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Accueil > Littérature > La Vierge au chemin vert
Difficile de suivre les pensées d’un professeur d’ethnologie comparée sur les sentiers de l’Anazomie. Les Pichus, dont il entreprend la chronique après des années d’un silence meurtri, sont-ils son vrai sujet d’étude ? Cet enseignant vieillissant et souffreteux, dont « l’état d’émotion » bouscule sans cesse « l’état de conscience », n’est-il au fond pas plus « exotique » ou décalé que les Pichus qu’il dépeint ? Et ne sommes-nous pas tous, comme il l’écrit lui-même au détour de phrases entêtantes et cadencées, des Pichus ?
La jungle est en nous. La peur nous anime. Notre univers d’enfants sages ou violents n’est rien de plus d’une succession d’instants volés à notre effrayante solitude.
Les frondaisons étaient les mêmes : vertes, sombres, noires. Et jaunies quelquefois. Elles rejoignaient le ciel sous d’étranges bavures qui faisaient des brouillards. Les matins se levaient comme si c’était des gaz. Ce n’était que des vents qui portaient des indiens les premiers feux de camps. Ils étaient emmurés sous l’effrayant silence qui les couvrait la nuit. C’était que de l’étrange, du mouillé, du parfait où est l’éternité que j’avais retrouvé, bien loin de mon jardin bouturé de dentelles, d’affeti couturés pour mieux me reposer : j’ai toujours aimé l’ombre qui sait bien vous cacher. C’est tout frais, murmurant, plein d’apaisants baisers où les bouches sont sûres, savent vous embrasser sans qu’on soit dérangé. C’est d’apaisants mystères à l’abri de l’été, à l’abri du tonnerre quand il est plein d’éclairs qui pourraient vous percer.
Les cieux étaient tranquilles pour les Pichus. Point d’avions. Point d’autos. Tout le Motta-Grosso était un reposoir entouré de cascades où s’agitaient les eaux qui s’écartaient des côtes. C’était pas la Bretagne. C’était pas la Corrèze. C’était la terre encore, échaudée des orages, engraissée des terreaux qui venaient de feuillages inconnus des oiseaux. Elle guidait ma pensée dans cette aube encore froide que les indiens fuyaient. J’avais ma couverture. Ils avaient la poussière. J’arpentais mon hamac. Ils s’approchaient du feu qui couvait sous la cendre encore tiède, bientôt morte, réduite à des atomes qui nous recouvriraient quand nous serions mangés.
Que d’images en ce matin glacial ! Les corps nus des enfants qui s’étaient mélangés pour mieux se réchauffer. Les derrières arrondis des fillettes nubiles que j’avais caressées. Deux vieillards immobiles, au regard enfoncé, noyé par des fumées, défoncés par l’alcool. Et puis les grands guerriers, amarrés à leur arc, penchés sur les replis d’un bras où l’on s’endort comme si l’on était deux, confortables, presque amis, solitaires sous les éparpillés d’une terre assassine, propice à tout manger dans les sombres dolines. La forêt est vivante. Tous les hommes y sont nés. Leur vraie nature y vit. Chacun est à sa place. Les formes ont des usages que rien ne peut toucher chez les Pichus. On est ombre ou lumière. On est plante ou tonnerre. Mais jamais femme et homme qu’est une inconséquence où l’horizon se casse sur de lointains parterres.
Ombres folles. Têtes mauves. Fonds puissants souvent teintés de bleus. Buissons creux où glissent des litières qui feraient des berceaux, où dorment des litières sous des milliers de cieux qui seraient endormis. L’indien partait encore pour percer les moineaux. Percer l’oiseau qui vole c’est toucher les nuages, c’est parler aux esprits mais c’est manger aussi. C’est être homme d’abord quand la corde se tend pour défoncer les airs. C’est murmurer des chants plus forts qu’à la veillée. C’est préparer son sexe pour l’enivrer d’un miel qui donnera la vie. Vie et mort se confondent chez les Pichus.
Pour les "gens ordinaires", c’est une surprise que donne à voir cette promenade dans les sources écrites du christianisme des premiers temps, appelé "primitif" par commodité.
2022
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